Desserte d’un terrain à lotir : le juge administratif doit-il vérifier l'existence du droit de passage ?


Par Laurent GIMALAC, Docteur en droit, Lauréat et Avocat spécialiste en droit de l’environnement.



La desserte d’un terrain à lotir peut nécessiter des travaux de voirie, par exemple pour élargir une voie existante, qui appartient à la Commune. Dans ce cas, on peut s’interroger sur la légalité d’une autorisation de lotir et de construire, si le lotisseur ne dispose pas de toutes les autorisations requises, voire s’il dispose d’une autorisation irrégulière.


Dans une affaire dans laquelle la convention instituant la servitude de passage était irrégulière et alors que les travaux d’élargissement méconnaissaient en eux-mêmes les exigences de l’article UE.3 du règlement de POS applicables, la juridiction administrative a dû définir précisément son domaine de contrôle.


L’enjeu était important, car dans l’éventualité d’une illégalité manifeste de la convention de servitude, le juge administratif aurait pu s’arroger le droit d’annuler la décision d’autorisation de lotir et ses suites.


Le Conseil d’Etat est venu préciser dans un arrêt important que le juge ne pouvait vérifier la légalité des actes ayant permis la réalisation d’une desserte, mais devait simplement examiner leur existence matérielle ou non.


« Considérant que lorsque, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte des terrains, notamment pour l'accès des engins d'incendie et de secours, l'administration doit, avant d'accorder une autorisation de lotir, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle d'assiette du lotissement et, le cas échéant, de l'existence d'une servitude de passage garantissant cette desserte, il ne lui appartient pas de vérifier la légalité des actes ayant permis la réalisation de cette desserte ou la validité de la servitude consentie ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu, sans commettre d'erreur de droit, juger que le moyen tiré de l'illégalité de certaines stipulations de la convention du 12 avril 2006 instituant une servitude de passage vers le lotissement litigieux était inopérant ;

Considérant, en revanche, que dans les cas particuliers où, pour accorder une autorisation de lotir, l’administration se fonde sur la circonstance que, en raison de travaux en cours ou futurs, la desserte du lotissement répondra à brève échéance et de manière certaine aux exigences légales, les motifs de légalité susceptibles de faire obstacle à la réalisation de ces travaux peuvent être utilement invoqués devant le juge de l’excès de pouvoir, au soutien de conclusions dirigées contre l’acte autorisant le lotissement » (Voir CE. 24 septembre 2012, Association des Amis de Saint-Palais sur Mer, req. n°336.598).


A la lecture de cet arrêt on peut donc en déduire que le contrôle est devenu essentiellement formel sauf cas particulier.

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