Par Me Laurent Gimalac, Avocat, Ancien Professeur à l’ISEM (ESMOD Paris) et à SUP DE LUXE (Groupe EDC, Paris).
L’e-acte d’avocat est bien une innovation majeure destinée à tous, et notamment au monde des affaires qui sera sensible à son efficacité et sa rapidité. Ses aspects pratiques doivent être diffusés pour changer les habitudes qui ont parfois la vie dure… Notre cabinet propose cette méthode à ses clients depuis 2015, et il est à votre disposition pour toute information à ce sujet.
Au commencement était l’acte d’avocat qui n’est pas un acte sous seing privé comme les autres.
Jusqu’alors, il n’existait en France que deux types d’actes : l’acte sous seing privé rédigé par les parties ou par un tiers, et l’acte authentique tarifé rédigé par un notaire.
Puis l’acte d’avocat a été créé depuis 2011, mais c’est sa reconnaissance par le code civil suite à une ordonnance du 10 février 2016 l’a popularisé et lui a conféré une autorité importante.
Il s’agit d’une variété « particulière » d’acte sous signature privée dont la portée est renforcée.
L’Article 1374 du code civil dispose désormais :
" L’acte sous signature privée contresigné par les avocats de chacune des parties ou par l’avocat de toutes les parties fait foi de l’écriture et de la signature des parties, tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayants cause. La procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable. Cet acte est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi ».
Toutefois malgré ses atouts, l’acte d’avocat « version papier » est resté relativement confidentiel et méconnu des entreprises ou des particuliers.
Une innovation importante le rend toutefois plus pratique et efficace : la création de l’e-acte d’avocat dématérialisé.
Ce dernier reprend les caractéristiques de l’acte d’avocat « papier » :
- l’avocat est contresignataire de l’acte ce qui en renforce la valeur,
- la signature de l’acte d’avocat fait foi de l’écriture et de la signature des parties, tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayants cause.
Comme le précise le CNB (Conseil national du barreau) à ce sujet, ce contreseing signifie :
"que l'avocat est présumé de manière irréfragable avoir examiné cet acte et conseillé son client, tout en assumant pleinement la responsabilité qui en découle,
que le client a signé l’acte en connaissance de cause, ce qui garantit la réalité du consentement des parties et limite les possibilités de contestation ultérieure
que les parties pourront se prévaloir de la validité du document. Tel peut être le cas, par exemple, d'une reconnaissance de dette découverte par des héritiers plusieurs années après la mort de celui qui l'a signée. S'il s'agit d'un simple acte sous seing privé, les débiteurs peuvent toujours contester la signature figurant sur la reconnaissance de dette. Avec un acte d’avocat, cela leur sera impossible, sauf à entamer des poursuites devant les tribunaux. »
Les atouts de l’e-acte d’avocat dans le monde des affaires
L’e-acte d’avocat dispose en plus de sérieux atouts dans le monde des affaires (baux commerciaux, cession d’un fonds de commerce ou de parts de sociétés…) ou même pour les particuliers (bail d’habitation…) :
- il n’est pas nécessaire de signer chaque page, une signature électronique unique est requise : le gain de temps est appréciable surtout lorsqu'il fallait signer 10 exemplaires d’un bail commercial … une « perte » de temps d’une à deux heures…
- le document signé est infalsifiable,
- l’acte est automatiquement archivé en ligne, ce qui signifie que chaque signataire y a accès n’importe quand pendant de nombreuses années (jusqu’alors beaucoup d’archives « papiers » disparaissaient avec le temps, notamment après la retraite ou à la suite d’un dégât des eaux… c’est un autre atout appréciable),
- l’acte peut être signé soit en présence de son avocat, soit à distance, par exemple à son domicile ou au siège social de la société.
L’identité des signataires est elle aussi vérifiée et ils devront adresser à leur avocat une copie de leur passeport ou de leur carte d’identité.
La procédure pour signer est particulièrement simple : l’envoi d’un courriel au signataire est doublé d’un code OTP sur son mobile. Il lui suffit ensuite de suivre les instructions.
La seule contrainte technique est donc de disposer d’une adresse e-mail et d’un téléphone mobile qui peut recevoir des SMS… il faut constater qu’en 2017, le taux d’équipement est supérieur à 80 %, cela ne devrait donc pas poser de difficultés pour la plupart des signataires.
S’agissant du coût, l’e-acte d’avocat n’est pas plus cher qu’un acte papier. Il est soumis au paiement des honoraires de l’avocat : lequel est fixé librement en accord avec le client suivant les règles en vigueur « les honoraires de consultation, d’assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client » (article 10, 1er alinéa de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971).
L’e-acte d’avocat : la variété des actes de la vie des affaires qui peuvent être dématérialisés.
Il n’y pas de limites à l’e-acte d’avocat, sauf les actes qui doivent être rédigés sous la forme authentique (par exemple l’acte de vente immobilière) : on peut donc utiliser cette méthode pour les actes de cautionnement, les contrats commerciaux, les statuts de société, les cessions de parts de société, les cessions de fonds de commerce, les assemblées générales..
Autant dire que cet e-acte d’avocat est particulièrement adapté à la vie des affaires. Par exemple, comment signer une cession de droit au bail commercial ou une cession de fonds de commerce si le bénéficiaire n’habite pas la même région que le bailleur ou le titulaire du bail ?
Imaginons la pire des situations : l’une des parties réside aux Etats Unis alors que l’autre a son domicile en France… Avec l’acte papier, il fallait qu’ils prennent rendez vous chez leur avocat pour signer… quel temps perdu !
Avec l’e-acte d’avocat, ce n’est plus nécessaire, la signature peut être faite à distance… et ce en quelques minutes.
De plus, l’e-acte d’avocat peut être utilisé sans difficulté pour accomplir la formalité de l’enregistrement auprès des services fiscaux (par exemple pour une vente de fonds de commerce…). En effet, la Direction générale des finances publiques a rappelé, par une note de service adressée à ses directions sur l’ensemble du territoire, que la liste des actes admis à l’enregistrement est étendue à l’acte d’avocat électronique.
L’e-acte d’avocat également pour les transactions judiciaires en cas de procès.
En cas de litige commercial, il est également possible de mettre fin à une procédure en cours, par une transaction entre les parties (bailleur et preneur par exemple). On pourra prévoir un échéancier de paiement des loyers contre la sauvegarde du bail et des remises sur les pénalités pour défaut de paiement des échéances.
Cette transaction peut parfaitement être rédigée puis signée via l’e-acte d’avocat.
Ensuite, les parties pourront la soumettre à l’homologation du juge saisi pour lui donner la même valeur qu’un titre authentique (ce n’est pas une obligation).