Par Me Laurent GIMALAC, Docteur en droit et Avocat spécialiste en droit de l'environnement.
Lorsqu'un préfet délivre un arrêté d'autorisation d'exploitation pour une carrière ou pour une extension de celle-ci, certaines conditions relatives aux quantités maximales de matériaux extraits, aux changements d'activité, et aux modifications de l'exploitation sont spécifiquement encadrées. Ces éléments font partie intégrante du cadre réglementaire des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), afin d'assurer une exploitation durable et en conformité avec les exigences environnementales.
1. Quantités maximales d'exploitation
L'arrêté d'autorisation précise généralement les volumes maximaux de matériaux pouvant être extraits de la carrière. Ces limites sont déterminées en fonction de plusieurs facteurs :
- Capacité de la carrière : Le volume total de ressources exploitables est évalué lors de l'instruction du dossier. Cette capacité est souvent mise en relation avec la durée d'exploitation autorisée, l'impact sur l'environnement et les infrastructures locales, ainsi que les besoins économiques de l'exploitant.
- Études d'impact environnemental : Les études préalables analysent les effets potentiels de l'extraction sur les écosystèmes locaux (sols, eau, faune, flore) et peuvent conduire à la mise en place de restrictions quantitatives, pour limiter les nuisances liées à l'exploitation (pollution, bruit, trafic routier, etc.).
Si l'exploitant dépasse les quantités maximales autorisées, il est susceptible de faire l'objet de sanctions administratives, telles que des amendes, voire une suspension de l'autorisation. De plus, ces dépassements doivent souvent être signalés aux autorités, qui peuvent exiger des mesures correctives.
2. Conditions de demande d'une nouvelle autorisation en cas de changement d'activité
Un changement significatif dans l'activité de la carrière, par exemple le passage à une nouvelle méthode d'extraction ou un changement dans le type de matériaux extraits, peut nécessiter une nouvelle demande d'autorisation. Les principales conditions qui rendent une nouvelle autorisation obligatoire sont :
- Changement de l'objet de l'exploitation : Si l’exploitant souhaite extraire des matériaux différents de ceux pour lesquels l’autorisation initiale a été accordée (ex. passage d’une extraction de gravier à une extraction d’argile), il doit déposer un nouveau dossier auprès du préfet. Ce dossier devra comprendre une nouvelle étude d'impact et être soumis à une enquête publique, comme pour une nouvelle demande d'autorisation.
- Modification des procédés : Un changement majeur dans les méthodes d'exploitation (utilisation d'explosifs, modification des processus industriels de traitement) peut constituer un motif pour requérir une nouvelle autorisation, notamment si cela modifie les impacts environnementaux ou les risques pour la sécurité publique.
3. Définition d'une modification substantielle
La notion de modification substantielle dans le cadre d'une autorisation d'exploitation de carrière est définie par les articles du Code de l’environnement, notamment en référence aux installations classées. Une modification substantielle intervient lorsqu'une modification de l'exploitation :
- Affecte de manière significative l'environnement ou la santé publique : Toute augmentation des nuisances (bruit, poussière, pollution des eaux, etc.) ou des risques pour les populations locales peut être considérée comme substantielle. Un simple changement de procédé ou d'organisation qui n'entraîne pas de nouveaux impacts significatifs ne sera pas qualifié de substantiel.
- Modifie les paramètres techniques de l'exploitation : L'augmentation de la superficie exploitée, une hausse substantielle des volumes extraits au-delà des seuils prévus dans l’arrêté, ou l’introduction de nouvelles installations (telles que des broyeurs ou des stockages de matériaux) peuvent constituer des modifications substantielles.
- Entraîne une évolution des risques : Si une nouvelle activité présente des risques supplémentaires pour l’environnement ou pour la sécurité des travailleurs et des riverains (par exemple, risques d'accidents industriels), une telle évolution sera qualifiée de substantielle.
En cas de modification substantielle, l’exploitant est tenu de déposer un dossier de demande d’autorisation auprès du préfet. Ce dossier comprend une réévaluation des impacts environnementaux et peut nécessiter une enquête publique supplémentaire.
Synthèse pour l'exploitant
L'exploitant doit donc être particulièrement vigilant concernant les éléments suivants :
- Volumes maximaux d'extraction : Ils doivent être strictement respectés, sous peine de sanctions.
- Changement d'activité : Toute modification de l'objet de l'exploitation ou des procédés employés doit faire l'objet d'une nouvelle demande d'autorisation.
- Modification substantielle : Dès lors qu’une modification entraîne des impacts significatifs ou de nouveaux risques, l’exploitant doit soumettre un nouveau dossier pour réévaluer son activité.
En conclusion, l'exploitant doit anticiper ces enjeux et s’assurer que tout changement dans l'exploitation, que ce soit en termes de volume, de nature de l'activité ou d'impact environnemental, soit en conformité avec l’autorisation préfectorale. Un suivi régulier et une évaluation proactive des risques liés aux activités de la carrière sont essentiels pour garantir une exploitation continue et conforme.