Réduire le risque du vendeur dans le cadre d'une Garantie de Passif Environnemental (GAP) : méthode et exemples de clauses.

Par Me Laurent GIMALAC, Docteur en droit et Avocat spécialiste en droit de l'environnement. 


Lors de la cession des actions d'une entreprise exploitant une carrière, la garantie de passif environnemental (GAP)représente un enjeu crucial tant pour l'acquéreur que pour le vendeur. Ce dernier souhaite en effet limiter sa responsabilité pour les passifs environnementaux antérieurs à la cession, tandis que l'acquéreur cherche à se protéger contre les risques de passifs non identifiés. Afin de réduire les risques pour le vendeur, plusieurs clauses doivent être rédigées avec une attention particulière. L'analyse de chaque clause permet d’assurer un équilibre entre la protection de l’acquéreur et la limitation de la responsabilité du vendeur.

1. Définition des passifs couverts : limiter l'étendue de la garantie

L'une des premières précautions consiste à définir précisément le champ d'application de la garantie de passif environnemental. En effet, une définition trop large pourrait englober des passifs non anticipés ou futurs, exposant le vendeur à des risques imprévus.

Préconisations :

  • Limiter la garantie aux passifs environnementaux identifiés à la date de cession.
  • Exclure les passifs futurs liés à des événements postérieurs ou à des changements réglementaires.

Exemple de clause :

« Les passifs environnementaux couverts par la présente garantie sont strictement limités aux passifs découlant d'événements antérieurs à la date de la cession, identifiés dans les audits environnementaux réalisés à la date des présentes, et n'incluent en aucun cas les obligations résultant de modifications réglementaires ou législatives ultérieures. »

2. Durée de la garantie : une période limitée pour encadrer la responsabilité

La durée de la garantie de passif environnemental doit être bien définie. Si la garantie s’étend sur une période trop longue, le vendeur reste exposé à des réclamations longtemps après la cession.

Préconisations :

  • Limiter la durée de la garantie à une période raisonnable, par exemple entre 2 et 5 ans, en fonction des obligations réglementaires liées aux passifs environnementaux.
  • Préciser que la garantie ne peut être prolongée qu'en cas de procédures déjà engagées avant la fin de cette période.

Exemple de clause :

« La présente garantie prend fin automatiquement au terme d’une période de trois ans à compter de la date de la cession des actions, sauf en cas de procédure en cours introduite par l’acquéreur avant cette date. »

3. Plafond financier de la garantie : limiter l'exposition financière du vendeur

Un autre moyen efficace pour protéger le vendeur est de fixer un plafond financier pour la garantie. Cela permet de définir un montant maximum au-delà duquel le vendeur n'est plus responsable des passifs.

Préconisations :

  • Fixer un plafond global de responsabilité en pourcentage du prix de cession (généralement entre 10 % et 20 %).
  • Plafonner les passifs spécifiques : Il peut être pertinent de prévoir des plafonds spécifiques pour certaines catégories de passifs (par exemple, les coûts de réhabilitation).

Exemple de clause :

« La responsabilité du vendeur au titre de la garantie de passif environnemental est plafonnée à un montant maximum de 500 000 €, correspondant à 10 % du prix de cession des actions. »

4. Franchise ou seuil de déclenchement : éviter les petites réclamations

Pour protéger le vendeur des réclamations mineures, il est recommandé d’inclure une clause de franchise, qui fixe un seuil minimal avant que la garantie ne puisse être activée.

Préconisations :

  • Fixer une franchise absolue : Un montant minimal (par exemple, 20 000 €) en dessous duquel la garantie ne s’applique pas.
  • Prévoir une franchise cumulative : La garantie ne peut être activée qu'une fois un certain montant cumulé atteint.

Exemple de clause :

« La présente garantie ne pourra être activée que pour des passifs environnementaux dont le montant cumulé dépasse 25 000 €. En deçà de ce montant, aucun recours ne pourra être exercé à l'encontre du vendeur. »

5. Notification des passifs : un délai court pour informer le vendeur

La clause de notification oblige l’acquéreur à informer rapidement le vendeur dès qu’un passif environnemental est découvert. Cela permet au vendeur de se protéger contre des réclamations tardives et de participer activement à la résolution du problème.

Préconisations :

  • Imposer un délai court de notification : L’acquéreur doit notifier le passif dans les 30 à 60 jours suivant sa découverte.
  • Exiger des informations précises sur le passif : Nature exacte du passif, coûts estimés, et actions correctives entreprises.

Exemple de clause :

« L’acquéreur devra notifier au vendeur par écrit tout passif environnemental découvert dans un délai maximum de 30 jours après sa découverte, en précisant la nature du passif, les coûts estimés et les actions correctives déjà engagées. À défaut, le vendeur sera déchargé de toute responsabilité au titre de ce passif. »

6. Participation du vendeur aux mesures correctives : contrôler les coûts de la dépollution

Le vendeur peut également chercher à inclure une clause lui permettant de participer aux décisions concernant les mesures correctives à mettre en place. Cela permet de contrôler les coûts et d’éviter que l’acquéreur ne choisisse des solutions trop coûteuses.

Préconisations :

  • Consultation obligatoire : Le vendeur doit être consulté avant la prise de toute décision concernant les mesures correctives.
  • Proposition de solutions alternatives : Permettre au vendeur de proposer des solutions alternatives moins coûteuses pour remédier aux passifs.

Exemple de clause :

« L'acquéreur devra consulter le vendeur avant de prendre toute mesure corrective ou de dépollution. Le vendeur pourra proposer, à ses frais, des solutions alternatives pour remédier au passif dans les meilleures conditions financières. »

7. Transfert de responsabilité à des tiers : assurances et sous-traitants

Le vendeur peut également transférer une partie des risques à des tiers, par exemple à travers des assurances spécifiques ou en faisant intervenir des sous-traitants.

Préconisations :

  • Sous-traitance des passifs : Permettre au vendeur de recourir à des sous-traitants spécialisés pour gérer certains passifs environnementaux.
  • Assurance environnementale : Souscrire une assurance couvrant les risques environnementaux identifiés.

Exemple de clause :

« Le vendeur se réserve le droit de faire intervenir des sous-traitants spécialisés pour gérer les passifs environnementaux. En outre, une assurance environnementale couvrant les risques de pollution post-cession est souscrite par le vendeur pour un montant de 200 000 €. »

8. Clause de changement législatif : protéger le vendeur contre les évolutions réglementaires

Il est essentiel de prévoir que la garantie de passif ne s'appliquera pas en cas de changement législatif postérieur à la cession, afin de protéger le vendeur contre des obligations nouvelles.

Préconisations :

  • Exclure les passifs liés à des modifications législatives postérieures à la cession.
  • Limiter la garantie aux lois et règlements en vigueur à la date de cession.

Exemple de clause :

« Le vendeur ne sera en aucun cas responsable des passifs environnementaux résultant de changements législatifs ou réglementaires postérieurs à la date de cession des actions. »

Conclusion

La garantie de passif environnemental dans le cadre de la cession des actions d’une entreprise exploitant une carrière est un outil de protection complexe, mais indispensable. En suivant ces préconisations et en rédigeant des clauses spécifiques, il est possible de limiter le risque pour le vendeur, tout en offrant à l’acquéreur une protection contre les passifs environnementaux. Chaque clause, qu’elle porte sur la durée, les plafonds financiers, les modalités de notification, ou encore la gestion des mesures correctives, doit être minutieusement étudiée pour assurer un équilibre entre les intérêts des parties.


Me Laurent Gimalac, Docteur en droit de l’environnement,

Avocat spécialiste en droit de l’environnement.



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