De la place des usages locaux dans le règlement des litiges sur les plantations.


Par Laurent GIMALAC, Docteur en droit, et Avocat spécialiste en droit de l’environnement.


Introduction.


La question des distances à respecter pour la plantation d'arbres, d'arbrisseaux et d'arbustes à proximité de propriétés voisines est régie par les articles 671 et 672 du Code civil. Ces dispositions légales peuvent être modifiées ou complétées par des usages locaux, notamment en région parisienne. Cette synthèse vise à éclairer la place des usages dans ce cadre légal et jurisprudentiel, tout en mettant en lumière les spécificités des usages parisiens et leur portée géographique.


Partie 1: Cadre légal et jurisprudentiel général


L'article 671 du Code civil fixe des distances minimales pour la plantation d'arbres à proximité de la propriété voisine. Ces distances peuvent être modifiées par des règlements locaux ou des usages constants et reconnus. La jurisprudence a précisé que ces règles ne s'appliquent qu'aux fonds bordant une propriété privée.


Partie 2 : Sur la place des usages locaux et leur évolution


I - Sur l’exemple « extensif » des usages « parisiens » 


Les usages locaux parisiens permettent la plantation jusqu'à l'extrême limite des jardins, sous réserve de l'élagage. Ces usages ont été confirmés par plusieurs décisions de justice, notamment :


Civ. 3e, 14 févr. 1984, no 82-16.092: Gaz. Pal. 1984. 2. 437

Paris, 6 juill. 1982: Gaz. Pal. 1982. 2. 578

Versailles, 18 mars 1988

Paris, 10 oct. 1990: D. 1991. Somm. 313, obs. A. Robert

Versailles, 21 nov. 1997: D. 1998. Somm. 349, obs. A. Robert (1re esp.)

Paris, 20 juin 2002: Gaz. Pal. 2003. Somm. 1310


La portée géographique de ces usages s'étend au fur et à mesure que se développe la région parisienne.


Bien que les usages locaux parisiens permettent des plantations jusqu'à la limite séparative, ils ne doivent pas causer de gêne excessive au propriétaire du fonds voisin. Des troubles anormaux de voisinage peuvent entraîner des sanctions sous forme de dommages-intérêts et d'astreintes pour assurer l'exécution de travaux, comme l'arrachage ou l'élagage des arbres.


II - Sur la reconnaissance par le juge d'usages locaux en Vaucluse entrant en conflit avec le Code Civil


Un exemple particulièrement intéressant concerne le département de Vaucluse. Selon une question écrite au Sénat, un récent jugement dans ce département s'est appuyé sur un recueil des usages locaux datant de 1917 pour condamner plusieurs propriétaires à l'arrachage de leurs haies. Ce jugement a été rendu malgré le fait que l'article 671 du Code civil réglemente le positionnement de haies dans ce département depuis des décennies.


Le ministère de la Justice a répondu que l'article 671 du Code civil permet une adaptation de la norme grâce aux usages locaux. Ces usages peuvent évoluer dans le temps et l'espace, et leur existence est appréciée souverainement par les juges du fond. Le ministère a également souligné que les règles actuelles répondent à la préoccupation de prendre en compte l'évolution des usages.


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