Les pièges de l'assignation en partage d'indivision : quelques éclaircissements jurisprudentiels.
Par Me Laurent GIMALAC, Avocat spécialiste
Docteur en droit privé
On savait que l'action en partage était un parcours semé d'embuches, qu'il fallait respecter un stricte formalisme procédural. Il convenait notamment faire une tentative amiable avant d'engager la procédure judiciaire, ce qui ralentit le déclenchement de la procédure et peut entraîner par défaut, un rejet de l'assignation. L'assignation devait également contenir un descriptif sommaire des biens à partager.
Autant de contraintes qui peuvent rendre la tâche des conseils bien compliquée…
Pour autant les héritiers n'ont parfois pas le choix, pour sortir de l'impasse d'une indivision qui ne satisfait personne et qui devient ingérable sur le long terme.
De récentes décisions viennent de rendre un peu plus facile la mise en oeuvre procédurale de cette action devant le tribunal de grande instance.
I - UN ASSOUPLISSEMENT DES RÈGLES FORMELLES POUR LE CREANCIER POURSUIVANT DEMANDEUR DU PARTAGE
L’action oblique dispense des formalités 1360 CPC.
Référence : Cour d’appel de Paris, Pôle 3, Ch. 1, 22 janv. 2014, RG N° 13/04148.
Le créancier personnel de l’indivisaire ne dispose, sur le fondement de l’art 815-17, alinéa 3, du Code civil, que de la faculté de provoquer le partage au nom de son débiteur, de sorte que les dispositions de l’art. 1360 du Code de procédure civile (CPC), qui imposent notamment à l’indivisaire demandeur en partage de préciser les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable, ne sont pas applicables à l’action oblique en partage.
S'il pouvait y avait un doute jusqu'à présent, la solution vient d’être confirmée par la cour de cassation qui clot le débat:
«Les dispositions de l'article 1360 du code de procédure civile ne sont pas applicables à l'action oblique en partage engagée par le créancier personnel d'un indivisaire, sur le fondement de l'article 815-17 du code civil» (Cour de cassation, 1re chambre civile, 25 septembre 2013, n° 12-21.272).
II - UN ASSOUPLISSEMENT DES REGLES POUR LES HÉRITIERS DEMANDEURS DU PARTAGE
La question du descriptif sommaire des biens ou de la tentative amiable a été l'objet de moyens dilatoires visant à demander l'irrecebailité de l'assignation en partage.
La cour d'appel d'Aix en Provence semble assouplir cette exigence en lui donnant une toute autre portée. La solution dégagée est d'autant plus importante qu'elle a été validée par la cour de cassation :
« L'omission, dans l'assignation en partage, de tout ou partie des mentions prévues à l'art. 1360 c. pr. civ. est sanctionnée par une fin de non-recevoir ; [...] cette omission est susceptible d'être régularisée, de sorte qu'en application de l'art. 126 du même code, l'irrecevabilité est écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue ; [...] il s'en déduit que l'appréciation de la situation ne dépend pas du seul examen de l'assignation ;
[...] ayant retenu exactement que l'assignation n'avait pas à donner la consistance et la valeur exacte du patrimoine à partager et estimé souverainement, par motif adopté, que cet acte en contenait un descriptif sommaire, la cour d'appel a procédé à la recherche que la quatrième branche lui reproche d'avoir omise ».
En conclusion, le descriptif sommaire des biens peut être régularisé en cours de procédure (tant que la clôture n'a pas été prononcée) car il s'agit d'une fin de non recevoir et non d'un moyen d'irrecevabilité, et il n'est plus nécessaire que l'assignation contienne ces mentions à peine de nullité.