Comment distinguer le préjudice écologique de l’écocide ?

Par Me Laurent GIMALAC, Avocat spécialiste en droit de l'environnement.


La différence principale entre le préjudice écologique et l'écocide réside dans leur nature juridique, leur finalité et leur cadre d'application. Bien que les deux notions visent à protéger l’environnement, elles sont distinctes dans leurs fondements et leurs implications.

1. Le préjudice écologique : un concept civiliste

  • Nature juridique : Le préjudice écologique est une notion de droit civil, consacrée par les articles 1246 à 1252 du Code civil. Il permet d'engager la responsabilité civile pour réparer une atteinte aux éléments ou fonctions des écosystèmes (eau, air, sol, biodiversité).
  • Finalité : La réparation du préjudice écologique vise à restaurer l'environnement dans son état initial autant que possible. La priorité est donnée à une réparation en nature, et à défaut, à une compensation financière affectée à des actions de restauration.
  • Critère essentiel : L'atteinte doit être non négligeable et se rapporte à des dommages causés aux écosystèmes eux-mêmes, indépendamment des conséquences sur les humains ou leurs biens.
  • Sanction : La responsabilité est réparatrice, avec un objectif de restauration de l’environnement.

2. L’écocide : une infraction pénale

  • Nature juridique : L’écocide est une notion de droit pénal, introduite par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 (dite loi « Climat et Résilience »), qui a créé un nouveau chapitre intitulé « Atteintes générales aux milieux physiques » dans le Code de l’environnement. Elle est définie à l’article L.231-3 du Code de l’environnement.
  • Finalité : L’écocide vise à sanctionner pénalement les atteintes graves et durables à l’environnement, commises de manière intentionnelle ou avec une violation manifeste des obligations légales ou réglementaires.
  • Critère essentiel :
    • L’écocide se caractérise par une violation intentionnelle ou gravement négligente d’une obligation légale de prudence ou de sécurité.
    • L’atteinte doit entraîner des effets graves et durables sur la santé, la flore, la faune, ou sur le régime normal des milieux naturels.
  • Sanction : L’écocide est puni de 5 ans d’emprisonnement et d’1 million d’euros d’amende, montant qui peut être porté au quintuple de l’avantage tiré de l’infraction.


3. Objectifs et complémentarité

  • Préjudice écologique : Il vise à répondre aux atteintes causées, sans considération de l’intention ou de la faute. Il repose sur une logique de réparation et restauration.
  • Écocide : Il a une vocation répressive, ciblant les comportements particulièrement graves et intentionnels, pour dissuader les auteurs potentiels de commettre des infractions écologiques majeures.

4. Conclusion

Le préjudice écologique et l’écocide s’inscrivent dans une logique complémentaire :

  • Le préjudice écologique protège l’environnement en tant que valeur intrinsèque, avec une approche réparatrice basée sur le droit civil.
  • L’écocide vise à sanctionner pénalement les atteintes graves et intentionnelles à l’environnement, renforçant ainsi la dissuasion.

En résumé, le préjudice écologique est une mesure réparatrice, tandis que l’écocide est une mesure répressive réservée aux atteintes environnementales d’une gravité exceptionnelle. Ces deux outils permettent de renforcer la protection juridique de l’environnement à différents niveaux.


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