Par Me Laurent Gimalac, Docteur en droit, Avocat spécialiste en droit de l'environnement.
La question de savoir si un règlement de lotissement peut imposer une servitude de canalisation est complexe et dépend de l'interprétation des textes réglementaires et des décisions de jurisprudence.
Généralement, dans de telles affaires, les parties peuvent invoquer plusieurs moyens pour contester l'existence ou l'imposition d'une servitude, tels que :
- L'absence de mention de la servitude dans les actes officiels ou le règlement de lotissement.
- La non-conformité avec les procédures administratives, notamment l'absence d'arrêté municipal établissant explicitement la servitude.
- La violation des droits de propriété due à l'imposition d'une servitude non prévue au moment de l'acquisition du bien.
Dans l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 4 mai 2023, référencé sous le numéro RG 20/00288, la Cour a statué que le règlement de lotissement ne pouvait pas imposer de servitude de canalisation sans un arrêté municipal ou un document administratif explicite. Dans cette affaire, le règlement du lotissement ne mentionnait pas explicitement le passage d'une canalisation d'évacuation des eaux usées du lot nº 98 sur le lot nº 99, et par conséquent, aucune servitude n'était prévue.
Parmi les moyens soulevés pour contester cette servitude, il est notable que l'une des parties a argumenté que le règlement du lotissement ne prévoyait pas explicitement une telle servitude pour l'évacuation des eaux usées entre les lots concernés. En outre, il a été avancé que la mise en place d'une servitude requiert une action spécifique par l'autorité compétente, comme un arrêté municipal, ce qui n'avait pas été le cas ici.
Un argument particulièrement intéressant invoqué est celui lié à la nature prévisionnelle d'une clause dans le règlement du lotissement. Il a été souligné qu'une disposition qui prévoit une règle pour l'avenir, dans ce contexte, ne pourrait pas être interprétée comme la création d'une servitude, à moins d'être explicitement désignée comme telle et établie conformément aux procédures légales. Cette argumentation repose sur le principe que les servitudes doivent être clairement établies et ne peuvent pas résulter de dispositions vagues ou implicites destinées à régir des situations futures non spécifiques.
Cette décision s'aligne sur la jurisprudence qui exige une base légale claire pour l'imposition de servitudes dans un lotissement.