Obligation d’information de l’acheteur sur les risques naturels : nuances et variations sur la mise en oeuvre de l’article L 125-5 du code de l'environnement.


Par Me Laurent GIMALAC, Docteur en droit, Lauréat et Avocat spécialiste en droit de l’environnement.



I - La règle  : une information sur les risques (visite, compromis, acte réitéré)


Les acquéreurs d’un bien immobilier ne le savent pas toujours, mais le code de l'environnement leur apporte une garantie supplémentaire qui n'est pas négligeable dans un climat d’incertitude.

Ainsi l’article L 125-5 dudit code dispose :

« Les acquéreurs ou locataires de biens immobiliers situés dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques technologiques, par un plan de prévention des risques miniers ou par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé, dans des zones de sismicité ou dans des zones à potentiel radon définies par voie réglementaire ou dans une zone susceptible d'être atteinte par le recul du trait de côte définie en application des articles L. 121-22-2, L. 121-22-3, L. 121-22-6 et L. 121-22-7 du code de l'urbanisme, sont informés par le vendeur ou le bailleur de l'existence de ces risques. A cet effet, un état des risques est établi".

L’article précise également :

"En cas de mise en vente de tout ou partie d'un immeuble, l'état des risques est remis au potentiel acquéreur par le vendeur lors de la première visite de l'immeuble, si une telle visite a lieu ».

Enfin, il est spécifié :

« Sans préjudice des deux premiers alinéas du présent I bis, l'état des risques est :

1° Intégré au dossier de diagnostic technique prévu à l'article L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation ou, lorsque la vente porte sur un immeuble non bâti, annexé à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l'acte authentique de vente ;

2° Annexé à l'acte authentique de vente et, le cas échéant, au contrat préliminaire, en cas de vente en l'état futur d’achèvement ».

On peut douter qu'en pratique, les Agences Immobilières ou les vendeurs pensent à remettre immédiatement un tel document à l'acquéreur potentiel. Pourtant cette obligation est belle est bien prévue par le code de l'environnement comme cela vient d'être rappelé.

En tout état de cause, cette information figurera « in fine »  au dossier de diagnostic technique et sera annexée à l'acte authentique de vente final.

La mise en œuvre de cette obligation présente parfois quelques difficultés pratiques et la jurisprudence a du en préciser les contours.


II - Précisions des contours par la jurisprudence


Dans une affaire dans laquelle l'acquéreur avait refusé de réitérer la vente d'un immeuble à usage d'habitation du fait de la non production lors de la signature du compromis du plan de prévention des risques naturels, la cour d’appela  relevé que la Commune de rattachement figurait bien dans un périmètre d'un plan de prévention des risques pour les aléas inondations et mouvements de terrain, mais qu'il convenait de déterminer si l'immeuble se situait est bien à l'intérieur dudit périmètre  ce que les documents soumis à la cour ne permettait pas d’évaluer. Pour s'en assurer la cour d'appela décidé la désignation d'un expert judiciaire (CA Douai, 11 mars 2013, nº 12/00419).

Dans une autre affaire, les acquéreurs avaient bien reçu le document sur l'état des risques naturels et technologiques mais estimaient que ces documents comportaient des mentions incomplète et erronées.

La Cour a jugé qu'aucune information n'avait été portée à la connaissance des acheteurs sur un périmètre de précaution tenant à un indice de cavité souterraine lié à un effondrement survenu en 2001.

Bien que les conséquences de ce défaut d'information fussent limitées puisque l'habitation avait déjà été construite, la Cour rappelle qu'il était du devoir des vendeurs d'informer les acheteurs de cette particularité et que cette circonstance pouvait être de nature à diminuer la valeur du bien au moment de la revente.

Les juges ont même précisé qu’il aurait fallu produire une cartographie précisant que le bien était situé dans une zone teintée en jaune signifiant un risque de ruissellement (CA Rouen, 29 mai 2013, nº 12/04062).

Les conséquences peuvent être dramatiques pour les vendeurs. En effet les acquéreurs vont souvent demander sur le fondement des vices cachés la résolution de la vente du fait de l'exposition à un risque naturel.

Tel a été le cas dans une affaire qui a été jugée devant la Cour d'appel de Pau en 2013, les acquéreurs ayant été victime d'éboulement de terre et de roches contre la façade arrière de leur immeuble.

La cour d'appel a accueilli favorablement la demande de résolution de la vente sur le fondement de vice caché (CA Pau, 29 mai 2013, nº 11/04632).

L'intérêt de cette décision est de nous révéler que la simple production de l'état des risques naturels et technologiques peut ne pas suffire à couvrir le vendeur contre le risque de résolution.

Pourtant, l'annexe à l'acte de vente à l'état des risques naturels et technologiques précisait bien que l'immeuble était classé en zone rouge du plan de prévention des risques naturels au titre du risque avalanche, séisme et mouvement de terrain.

Les juges ont estimé que l'ERNT ne peut être considéré comme donnant une information suffisante, car ces documents ne prennent pas en compte la spécificité même du terrain et les risques particuliers en découlant (présence d’une falaise instable derrière la résidence).

On relève également l'existence d'une jurisprudence de plus en plus foisonnante concernant le caractère constructible ou non d'un terrain qui a été vendu. Une fausse information sur sa situation (incontructibilité) pourra entraîner non seulement la résolution de la vente sur la base des vices cachés mais également la responsabilité du notaire si celui-ci a commis une faute professionnelle (CA Versailles, 28 février 2013, nº 11/08163).

Aussi la seule manière pour les vendeurs de se prémunir lorsqu'ils ont connaissance d'un risque spécifique c'est de l'indiquer clairement dans l'acte de vente afin de ne pas avoir ensuite à supporter une action en résolution de la vente.


Me Laurent GIMALAC, Avocat et docteur en droit privé,

Lauréat de l’Université. 

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