Par Me Laurent GIMALAC, Avocat spécialiste et Docteur en droit privé.
L'avantage de la théorie des vices cachés, et qu'elle a un domaine d'application très vaste. Il suffit de démontrer qu'un élément essentiel a été dissimulé lors de la vente à l'acquéreur du bien immobilier. Ensuite tout est une question d'appréciation et de situation de fait. Les tribunaux sont mis à contribution, pour indiquer si il s'agit pas d'un vice caché avec l'aide d’Experts.
Certains acquéreurs immobiliers pourraient penser, que le foisonnement biologique ne fait pas partie de la garantie des vices cachés. Il n'en est rien. Plusieurs décisions témoignent en effet une certaine compréhension des tribunaux à leur endroit.
En cas d'infestation, d'insectes et notamment de blattes ou de cafards, les acquéreurs, ne sont pas totalement démunis. Ils ont plusieurs angles d'attaque. Ils peuvent engager la responsabilité du syndicat de copropriété si celui-ci a fait preuve de négligence.
"Aux termes de l'article 14 dernier alinéa de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat de copropriété est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. En application de ce texte, dès lors qu'il est établi que le dommage trouve son origine dans un défaut d'entretien des parties communes, le syndicat de copropriété encourt une responsabilité de plein droit dont il ne peut s'exonérer que par la démonstration de l'existence d'une cause étrangère » (Cour d'appel de Pau, 1ère Chambre civile, Arrêt nº 2018 du 6 mai 2008, Répertoire général nº 06/03434).
Mais ils ont également un recours contre les vendeurs, s'ils démontrent que cette infestation constitue un vice caché. Toutefois, il faudra vérifier que l'acte de vente ne contient pas une clause d'exclusion de garantie qui est parfaitement légal entre 2 particuliers.
En cas contraire, la responsabilité des vendeurs peut être engagée sous la forme d'une réduction du prix ou encore d'une annulation pure et simple de la vente.
"L'infestation du logement par des insectes en ce que ces derniers empruntent le cheminement (non identifiable sans démontage des éléments décoratifs de menuiserie des salles de bains) décrit par l'expert judiciaire constitue en soi un vice caché de nature à diminuer l'usage du bien et susceptible de justifier la mise en oeuvre de la garantie prévue par les articles 1641 et suivants du Code Civil » (Cour d'appel de Pau, 1ère Chambre civile, Arrêt nº 2018 du 6 mai 2008, Répertoire général nº 06/03434).
Il est possible d‘annihiler les effets d'une clause de non garantie même l’encontre d’un non vendeur non professionnel, si l’on apporte la preuve qu’il ne pouvait ignorer la présence des insectes et n’en a pas fait mention lors de la vente :
"La connaissance du vice par Monsieur X...antérieurement à la vente doit en l'espèce être considérée comme établie par les conclusions de l'expertise judiciaire (desquelles il résulte que la présence d'insectes dans l'appartement litigieux était préexistante à l'entrée en possession des époux Y...et que la présence d'insectes était également récurrente sur tout l'immeuble) corroborées par le contenu du procès-verbal d'assemblée générale de copropriété du 13 octobre 2001 (cf. résolution 11-1 autorisant le syndic à faire procéder à un traitement insecticide de toute la copropriété, parties communes et parties privatives), le vendeur ne pouvant invoquer une prétendue croyance légitime en l'efficacité du traitement entrepris par le syndicat de copropriété alors même qu'il résulte de la correspondance du syndic de copropriété du 22 février 2002 produite par l'appelant (pièce no 2) que le traitement insecticide visé au P. V. du 13 octobre 2001 n'a été mis en oeuvre que le 27 mars 2002, postérieurement même à la vente. » (Cour d'appel de Pau, 1ère Chambre civile, Arrêt nº 2018 du 6 mai 2008, Répertoire général nº 06/03434).
Il existe donc des voies de recours pour les acquéreurs malchanceux, qui seraient assaillis par des insectes tout aussi indélicats que leurs vendeurs… encore faut-il agir dans les délais légaux (soit tout de même 2 ans pour les vices cachés). Vous devrez entamer d’abord les négociations avec le vendeur en lui adressant une lettre recommandée puis en cas de refus, consulter un avocat spécialiste qui vous orientera vers une éventuelle procédure judiciaire appropriée.
Me Laurent GIMALAC, Avocat spécialiste et docteur en droit privé,
Lauréat de l’Université.