Vente pour cause d’une maison et découverte d’une décharge dans le sous sol : quels sont les recours ?


Par Me Laurent Gimalac, Avocat spécialiste et docteur en droit privé.


L’achat d'une maison peut parfois réserver de cruelles surprises.


Tel est le cas lors ce que les acquéreurs découvre quelques mois après leur achat que leur terrain dissimule une ancienne décharge publique ou sauvage.


Le cas n'est pas aussi rare que l'on pourrait l'imaginer. Il existe déjà une jurisprudence auprès des juridictions civiles initiée par les acheteurs malchanceux ou victimes de la malveillance de leurs vendeurs.


Rappelons que la réforme récente en droit des obligations introduit dans le code civile le silence ou la réticence comme un élément de dol c’est-à-dire une tromperie qui peut entraîner la nullité du contrat : or, jusqu’à présent cette théorie avait été essentiellement développée par la jurisprudence civile.


Tel était bien le cas dans cette affaire qui a été jugé le 5 décembre 2006 (donc avant la réforme du droit des obligations) par la Cour de cassation. Cet arrêt rappelle tout d'abord que les clause exonératoire de garantie des vices cachés ne sauraient être invoquée par un vendeur professionnel à l'égard d'un acquéreur qui ne l'était pas pas lui-même.


Mais surtout il confirme que la révélation de la présence d’une décharge en sous-sol est un vice relevant des articles 1641 et suivants du Code civil et non pas une erreur sur la substance. Pour que l’action de l’acquéreur soit recevable, il faut donc que le vice soit caché. Ainsi la connaissance par l’acheteur de la présence de l'ancienne décharge ne suffit pas dès lors que le vendeur a l'obligation de mentionner les conditions exactes dans lesquelles cette décharge avait été exploitée puis comblée. Un autre arrêt du 8 juin 2006 rendu également par la troisième chambre de la Cour de cassation avait jugé que l’ampleur d'une pollution qui n'était pas connue de l'acquéreur constitue est un vice caché rendant l'immeuble impropre à sa destination.


Ainsi même si l’acheteur avait eu connaissance de cette décharge, son ignorance des conséquences dommageables (toxicité etc.) peut constituer un vice caché qui lui permettra de demander la réduction du prix de vente ou la résolution de la vente.


Il veillera dans ce cas à introduire son assignation en justice dans le délai de deux ans à compter de la connaissance du vice ou mieux encore, dans les deux ans de l’achat pour ne pas avoir à démontrer à quelle époque il a pris connaissance du vice. Mais l’idéal est d’agir le plus vite possible, sinon l’acheteur pourrait perdre le droit de résilier la vente et ne percevoir que des dommages intérêts. La cour de cassation a ainsi jugé le 25 juin 2014 : "que les acquéreurs, qui ont occupé la maison pendant plus de deux années, sans effectuer de travaux, ne sont pas fondés à solliciter la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés. Ils peuvent en revanche obtenir l’indemnisation du préjudice subi du fait de ces vices, le montant des dommages intérêts alloués correspondant au montant des travaux de nature à mettre un terme aux vices cachés".


L’action est introduite devant le tribunal de grande instance du lieu de situation de l’immeuble, et le recours à l’avocat est dans ce cas obligatoire (car il s’agit d’une procédure au fond devant le TGI). Il faut compter 1 à 2 ans environ pour obtenir un jugement lequel peut-être l’objet d’un appel dans le délai d’un mois de sa signification par huissier de justice. 


La conséquence de la résolution de la vente sera la restitution du prix ainsi que certains frais liés à la vente elle-même. En effet, la faute de vendeur implique que l’acheteur ne supporte aucun frais lié à cette vente. Le vendeur devra donc restituer le prix intégral, et l’acheteur restituer un bien identique à celui qui lui a été vendu. Enfin, il est important de signaler que l’acheteur ne devra régler aucune indemnité d’occupation dès lors que la résolution de la vente ne lui est pas imputable mais résulte du dol du vendeur.


Enfin, la résolution de la vente devra faire l’objet d’une publication foncière pour qu’elle soit opposable aux tiers, y compris les services fiscaux pour la paiement de la taxe foncière. En effet, malgré l’effet rétroactif de la résolution d’une vente immobilière par décision de justice, l’acquéreur demeure redevable de la taxe foncière en l’absence de publication de cette décision et de mutation cadastrale.



Me Laurent GIMALAC, Avocat et docteur en droit privé,

Lauréat de l’Université. 

© Cabinet de Me Gimalac Avocat - Paris, Lyon, Cannes, Grasse - IDF et French Riviera  - 2020