Découverte de vices cachés et vente immobilière : quel est le point de départ de la période de garantie de deux ans ?


Par Me Laurent Gimalac, Avocat spécialiste et docteur en droit privé.



L’article 1648 du Code civil dispose en son alinéa 1er : « L’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice ».

Si l’acheteur agit dans le délai de deux ans de la signature de l’acte authentique il n’aura pas besoin de prouver à quelle date il a eu connaissance du vice, puisqu’il ne peut être suspecté d’avoir connu le vice avant même la vente.

Par contre, il lui incombe d’apporter la preuve de la date de connaissance du vice s’il agit plus de deux ans après l’acquisition de l’immeuble.

Cette question est cruciale, car sans cette preuve, son action pour vice caché sera irrecevable.


1°/ Point de départ fluctuant : appréciation souveraine des juges du fond


La jurisprudence apporte quelques repères utiles pour aider les requérants.

Ainsi, les juges du fond qui disposent d’une appréciation souveraine en la matière, admettent en général que la date de découverte du vice peut être placée au jour du dépôt du rapport d’expertise (Civ.1, 19 mars 1991, n°88-16208).

Mais parfois les juges estiment que la connaissance du vice est antérieure au dépôt du rapport de l’expert, par exemple quand il a été divulgué dans une note antérieure de l'expert.

« Attendu, d’autre part, qu’ayant relevé que la note adressée par l’expert aux parties, le 17 septembre 2003, établissait que la cause des désordres résidait dans une conception défectueuse des seuils de bois et des protections hautes, aux droits des trumeaux, qu’il en résultait un manque d’étanchéité des façades en retrait, que leur état nécessitait leur remplacement total et qu’il ne restait qu’à définir les modalités de réfection, la cour d’appel a souverainement retenu que le syndicat pouvait, à cette date, appréhender la gravité des désordres sans attendre la date du dépôt du rapport d’expertise définitif" (Cass. 3e civ, 14 septembre 2017, n° 15-28.981).


2°/ Interruption du délai par une assignation en référé expertise et reprise du délai


En cas d’expertise judiciaire, l’article 2239 du Code civil prévoit que la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une mesure d’instruction avant tout procès. 

Ainsi, l’interruption par l’assignation en référé expertise du délai de 2 ans pour agir en garantie des vices cachés fait courir un nouveau délai de 2 ans à compter de la date du prononcé de l’ordonnance désignant l’expert.

Tel ne sera pas le cas s’il s’agit d’une simple expertise amiable, qui elle ne suspend jamais les délais et ne les interrompt pas davantage. Au contraire ladite expertise pourra être utilisée contre les victime du vice pour démontrer qu’il en avaient connaissance depuis plus de deux ans…

Il faudra cependant être vigilant et les acheteurs devront délivrer l’assignation au fond  aux vendeurs dans les 2 ans après le prononcé de l’ordonnance comme vient  de le rappeler la cour de cassation en 2017 (Cass. 3e civ. 5-1-2017 n° 15-12.605 FS-PB) sinon la prescription sera acquise au bénéfice des vendeurs.

Il convient de noter par ailleurs, que le point de départ du délai de deux ans, n’est pas identique, si l’acheteur invoque un défaut de délivrance. Dans ce cas en effet, le point de départ est la date de la délivrance de l’immeuble donc généralement la date de la vente et de la prise de possession du bien. On peut donc parfaitement être forclos pour demander l’application de l’obligation de délivrance et encore dans les délais pour invoquer la garantie des vices cachés



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