Notion de pré-occupation et troubles du voisinage.

Par Me Laurent GIMALAC, Docteur en droit et Avocat spécialiste en droit de l'environnement. 


La pré-occupation est l’un des écueils de la théorie des troubles du voisinage, mais cet écueil n’est pas toujours incontournable.

Le principe est simple mais redoutable : un voisin ne peut se plaindre de nuisances qui préexistaient avant son emménagement, il est présumé avoir connu et accepté les troubles en s’installant.

Le principe de la préoccupation est définie par l’article L 112–16 du code de la construction et de l’habitation. En application de cet article, il est impossible de réparer d’indemniser un trouble anormal du voisinage lorsque ses conditions d’application sont remplies.

Au terme de cet article, les dommages causés aux occupants d’un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales, commerciales, n’entraînent pas droit à réparation lorsque le permis de construire afférent aux bâtiments exposés à ses nuisances a été demandé ou l’acte authentique constatant l’aliénation ou la prise de bail a été établi postérieurement à l’existence des activités les occasionnant des lors que ces activités s’exercent en conformité avec les dispositions législatives et réglementaires en vigueur et qu’elles se sont poursuivies dans les mêmes conditions.

Cette théorie d’autant plus redoutable, qu’elle est également appliquée par la juridiction administrative pour des ouvrages publics ou des installations classées ayant obtenu une autorisation administrative d'exploiter.

Elle exonère de toute responsabilité l’auteur d’un trouble dès lors que la victime s’est implantée aux abords d’une installation préexistante qui respecte les règles d’exploitation.

Inversement, un voisin pourra se plaindre de nuisances sonores excessives lorsque l’implantation est postérieure à son installation.

Fort heureusement, cet article doit être interprété strictement.

En effet il ne couvre pas les extensions d’activité, puisque l’article exige le maintien de l’activité d’origine dans les conditions antérieures de fonctionnement.

La prévisibilité d’une activité industrielle, ne suffit pas. Il faut que cette activité envisagée préexiste à l’installation du voisin.

Même dans un secteur urbain ou industriel, il n’y a pas nécessairement de préexistence présumée. On peut donc admettre l’existence d’un trouble anormal de voisinage dans une zone urbaine par exemple pour cause de perte d’ensoleillement, ou de vue même s’il n’y a jamais de droit acquis à une vue.

Inversement, l’acquéreur d’une maison proche d’une source de nuisances doit être vigilant sur les précautions qui ont été prises pour lutter contre le bruit. Ainsi un promoteur qui a construit un immeuble à côté d’un aérodrome sans prendre les précautions nécessaires entre le bruit est fautif et ne pourra pas se retourner ensuite contre l’exploitant sauf s’il ne respecte pas les règlements.

Les personnes qui se sont installées par exemple à proximité de l’aéroport d’Orly. Ne pouvaient ignorer depuis un décret de 1954 pourtant déclaration publique et d’aménagement et d’extension des travaux de l’aéroport, le risque de nuisances sonores.

En conclusion, l’acquéreur d’une villa ou d’un lot devra toujours se méfier ses activités dans son proche environnement avant de finaliser son acquisition. En effet, la pré-existence de nuisances peut constituer un solide frein à tout recours ultérieur.




Me Laurent Gimalac, Docteur en droit de l’environnement,

Avocat spécialiste en droit de l’environnement (Paris et Côte d’azur).

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